Comment construisez-vous votre répertoire?

[Evolène]

Hello à tous!

Une question que je me pose depuis déjà un moment.

J'ai commencé la harpe en partie par affection avec le répertoire celtique, folk, médiéval et new age. La harpe celtique semble être l'instrument prédestiné pour cela, et je ne sais pas si c'est mon amour pour la harpe qui m'a amené au répertoire ou l'inverse. Certainement les deux!

J'ai profité du confinement pour contacter mon harpiste préféré, Aryeh Frankfurter, pour acheter sa musique, ses bouquins et échanger avec lui (une magnifique expérience ). Or son répertoire est composé de deux "domaines" principaux : d'un coté, le répertoire folk-celtique-traditionnel, et de l'autre le répertoire Scandinave. Il a d'ailleurs écrit sur sa relation avec le répertoire scandinave, dont il n'est pas natif et avec lequel il n'a pas grandi, c'est très interessant.
Mais personnellement, le répertoire scandinave ne me parle pas particulièrement. Si j'ai plaisir à l'écouter parfois, je ne compte pas en faire une part intégrale de mon répertoire.


En commençant la harpe, ayant réfléchi à la question, j'ai pu directement demander à ma prof de travailler le répertoire qui me plait. Mais la plupart des gens n'opèrent pas ainsi : soit parce qu'ils commencent très jeunes et/ou qu'ils n'ont pas de goût très formés, donc les profs enseignent un panel de mélodies plus ou moins classiques. Ca fait plaisir aux grands-parents et ça forme l'oreille musicale.
Une jeune fille de mon entourage, par exemple, joue (au piano) du répertoire classique que sa prof lui enseigne (Gymnopédie, Fur Elise...) mais passe beaucoup de temps à chercher à faire des mélodies de jeu vidéo ou de musique pop. J'en déduis que si ça ne tenait qu'à elle, son répertoire "inné" ne serait pas ces musiques classiques.


Du coup, je m'interroge beaucoup sur ce répertoire plus ou moins "inné". Si l'on ne travaille que certains morceaux, on ne progresse pas forcément techniquement et on ne gagne pas forcément une approche de nouveaux genre musicaux comme le jazz ou le blues.

Quant à moi, plus le temps passe et moins j'ai envie de passer des heures à travailler une mélodie qui ne me parle pas.



De votre côté, comment avez-vous construit et continuiez-vous à construire ce répertoire? Vous retrouvez-vous dans cette liste (non-exhaustive) ci-dessous?

• Quand la mélodie vous plait, peu importe le genre!
  
• Vous ne jouez que d'un répertoire donné, par soucis d'authenticité
  
• Vous avez un répertoire essentiellement classique issu du conservatoire, pour progresser dans les paliers musicaux
  
• Vous avez un répertoire très hétéroclite composé de chansons apprises par goût, d'autres pour la technique, d'autres par commande
  
• Vous apprenez des morceaux qui font plaisir aux autres : musique pop, musique de films, etc
  
• Vous touchez à beaucoup de styles : jazz, blues, rock, folk, pop, classique car vous jouez à plusieurs
  

Cette question ne touche même pas aux questions connexes : que travailler quand on a un répertoire tellement étendu qu'on ne peut pas tout pratiquer en même temps? Quid des concerts, concours et autres champs où la musique est déterminée à l'avance? Le répertoire nous reflète--t-il, avec nos goûts et notre culture, ou pas?


Je suis très intéressée de connaître vos retours!  

[Octavie]

Voilà un sujet intéressant et tellement vaste.

Pour ma part, ayant commencé la harpe classique à 13 ans au conservatoire, le répertoire m'a été imposé.
Lors des examens, j'écoutais (fascinée)  les grands élèves, puisque les délibérations et résultats se déroulaient après.
Mon oreille a été formée, voire formatée, au répertoire pour harpe seule, notamment les standards : Grandjany, Tournier, Saint-Saens, Fauré, Roussel, Hasselmans, Godefroid... bref la musique du XIX et XX ème... que j'aime énormément.
J'ai eu la joie d'aller écouter Emmanuel Ceysson dans cette période harpistique et je me suis régalée.

Le conservatoire a été aussi la découverte de compositeurs contemporains (œuvres imposées pour les examens à partir d'un certain niveau) que je n'ai pas gardé dans mon répertoire.

Du coup, je m'interroge beaucoup sur ce répertoire plus ou moins "inné". Si l'on ne travaille que certains morceaux, on ne progresse pas forcément techniquement et on ne gagne pas forcément une approche de nouveaux genre musicaux comme le jazz ou le blues.

Pour moi, ce ne sont pas les morceaux eux-mêmes qui forgent la technique mais le temps consacré à la technique pure. Ce qui, en conservatoire se travaille avec des exercices spécifiques mais que l'on peut fabriquer soi-même à partir du morceau en question.
Mais je suis d'accord avec la deuxième partie de ta phrase.

Lorsque je me suis mise à la celtique, j'ai commencé par des œuvres proches de la harpe classique : New blues et Baroque flamenco de D. Henson-Conant par exemple.
J'ai ensuite écouté des centaines de fois Anne Postic lors de son passage au concours de harpe de Lorient et relevé ce qu'elle jouait pour le reproduire, puis Lina Bellard, François Pernel dont j'ai acheté le recueil (celui d'Anne Postic aussi) et tant d'autres.

Aujourd'hui, mon répertoire est composé à 3/4 de classique et 1/4 de touche à tout.
Variétés, musique de films, pop, un peu de jazz.

J'ai fait des découvertes récentes grâce a la chaîne de Celtik, j'ai acheté les partitions des mélodies qui me plaisent et je vais aller découvrir ton harpiste préféré que je ne connais pas.

Je m'inscris dans la catégorie
- Quand la mélodie vous plait, peu importe le genre!

La difficulté est, sur des morceaux longs qui ont demandés des semaines de travail, de réussir à les garder, pas forcément par cœur, mais dans la tête, dans les doigts (et dans les pieds pour la classique).
C'est rageant de voir à quel point cela s'échappe si je ne les pratique pas très régulièrement.

Pour les examens, les morceaux imposés devaient être prêts et par cœur dans un temps donné (je crois que c'était un mois ou un mois et demi).
Lorsqu'une oeuvre ne plait pas, c'est très difficile.
Lorsque le morceau est su mais que la technique n'a pas été poussée au maximum et que les mains séparées ne sont pas connues par cœur, ça joue des sales tours : cela m'a coûté un examen.... plantage deux fois (il y avait une reprise ) au même endroit.

Pour ma part, il m'a toujours fallu atteindre un niveau de conscience particulier pour ne pas perdre mes moyens et ne pas avoir les mains et les pieds comme des castagnettes.
Ce qui renvoie à mon sujet sur L'utilisation de vos ressources intérieures

Je reprends des cours depuis 4 ou 5 ans pour travailler ce reprétoire entendu au conservatoire mais je travaille seule le reste.

Pour finir, je dirais que maintenant, le répertoire me reflète bien et j'envisage de contacter l'Ehpad proche de chez moi.

[Wil Weten]

De votre côté, comment avez-vous construit et continuiez-vous à construire ce répertoire? Vous retrouvez-vous dans cette liste (non-exhaustive) ci-dessous?

• Quand la mélodie vous plait, peu importe le genre! - oui, renaissance, baroque, folk et pop!
  
• Vous ne jouez que d'un répertoire donné, par soucis d'authenticité - non, je veux bien trouver ma propre voix et je veux jouer, un carcan n'est pas pour moi.
  
• Vous avez un répertoire essentiellement classique issu du conservatoire, pour progresser dans les paliers musicaux - je trouve que édudier propre technique est important, mes jouer avec plaisir est plus important.
  
• Vous avez un répertoire très hétéroclite composé de chansons apprises par goût, d'autres pour la technique, d'autres par commande - oui, sauf de chansons par commande. Avant le lockdown j'avais une professeur de harpe, mais maintenant j'ai cessé des leçons.
  
• Vous apprenez des morceaux qui font plaisir aux autres : musique pop, musique de films, etc - non, sauf qu'il me plaisent aussi.
  
• Vous touchez à beaucoup de styles : jazz, blues, rock, folk, pop, classique car vous jouez à plusieurs - oui, sauf jazz et rock.
  

[Evolène]

Merci pour vos réponses!

@ Wil Weten, c'est très intéressant! Tu joues ce qui te plait pour trouver ta propre voix, mais tu te retrouves dans certains répertoires. Quand tu prenais des cours, est-ce que ta prof te demandais quels chansons tu voulais jouer, ou elle te donnait des partitions sans te demander ton avis?
Et bravo pour ces messages en français, c'est super de faire cet effort!  



@ Octavie, ton expérience avec la harpe classique est super intéressant : c'est un monde que je ne connais pas! (Le conservatoire, les examens de musique...)
Et c'est très parlant de voir qu'il faut pousser la technique au maximum pour avancer dans certains morceaux technique et les jouer dans des conditions stressantes : c'est justement ça, la force de cette méthodologie classique si exigeante!

Je note une chose intéressante :

La difficulté est, sur des morceaux longs qui ont demandés des semaines de travail, de réussir à les garder, pas forcément par cœur, mais dans la tête, dans les doigts (et dans les pieds pour la classique). C'est rageant de voir à quel point cela s'échappe si je ne les pratique pas très régulièrement.

Pour les examens, les morceaux imposés devaient être prêts et par cœur dans un temps donné (je crois que c'était un mois ou un mois et demi).
Lorsqu'une oeuvre ne plait pas, c'est très difficile.

Forcément, comment pratiquer des heures durant un morceau qui ne nous parle pas?

En tout cas, les goûts se développent aussi en fonction de ce qu'on joue. Un morceau qui ne nous parlait pas de prime abord peut nous plaire beaucoup quand on y passe du temps.

Pour moi, ce ne sont pas les morceaux eux-mêmes qui forgent la technique mais le temps consacré à la technique pure. Ce qui, en conservatoire se travaille avec des exercices spécifiques mais que l'on peut fabriquer soi-même à partir du morceau en question.  

Oui, tu as raison, j'aurai dû préciser. Je préfères travailler la technique en les incluant dans certains morceaux, pour travailler plusieurs choses en même temps, sauf quand ça coince. (Mais actuellement, par manque de temps, de prof et de motivation, je ne travaille que marginalement la technique, en fait   ).

[Wil Weten]

Tu joues ce qui te plait pour trouver ta propre voix, mais tu te retrouves dans certains répertoires. Quand tu prenais des cours, est-ce que ta prof te demandais quels chansons tu voulais jouer, ou elle te donnait des partitions sans te demander ton avis?

Mon professeur a choisi mes exercices techniques (de Maria Grossi). Parfois je lui ai proposé des pièces à jouer et parfois elle m'a proposé des pièces. Souvent, nous étions tous les deux satisfaits avec nos choix.

Généralement, aux Pays-Bas les édutiants ont beaucoup plus de la liberté de choix pendant des leçons de musique que dans un nombre d'autres pays.

[Octavie]

(Mais actuellement, par manque de temps, de prof et de motivation, je ne travaille que marginalement la technique, en fait ).

je te rassure, moi aussi, la technique c'est souvent à reculons

J'ai pratiqué aussi les exercices de Grossi cités par Wil, il y a aussi Larivière

[chris]

Eh oui, c'est un vaste sujet ! Peronnellement j'ai appris la harpe à pédales au Conservatoire et bien sûr suis passée par les exercices techniques, morceaux imposés... Maintenant je joue davantage sur la harpe celtique plus facile à transporter et joue relativement peu de classique sur la celtique. Alors, d'une certaine façon l'instrument guide aussi mon répertoire ! Quand j'ai envie de jouer du classique ou du baroque je passe sur grande harpe. Voilà donc un petite réflexion : votre instrument inspire-t-il votre répertoire? !

Personnellement j'aime varier les genres, les styles... Quand on joue en public c'est sympa aussi, ça permet de montrer différentes facettes de l'instrument que les gens associent souvent à un seul type de morceaux. Pour moi, un style me repose de l'autre. J'adore reprendre le classique après des mois de folk !
Et bien sûr il y a les valeurs sûres : les morceaux que je reprends toujours avec joie même après des années.

En tant qu'élève je pense que d'étudier des morceaux choisis par mon prof et que je n'aimais pas à tous les coups a été très formateur. D'abord techniquement, ça exerce à plein de choses, et musicalement : combien de fois me suis-je surprise à aimer un morceau après l'avoir travaillé alors que je n'avais aucune affinité au départ. C'est évidemment discutable.

En tant que prof ça m'est arrivé de faire des arrangements pour les élèves de pièces que j'aimais sans plus et que j'ai aussi finalement appris à aimer. Alors je crois que si on a le temps, il est bon d'être assez ouvert pour découvrir, expérimenter... On retiendra certaines choses, d'autres non. Le temps est précieux : il m' aide à faire un tri !

Je crois qu'il est important d'aborder des pièces pour travailler un aspect technique particulier. Les exercices sont intéressants mais je leur préfére un morceau qui fait travailler une difficulté si j'ai le choix (pour moi ou pour mes élèves). Bien sûr l'un n'exclut pas l'autre.

Mon répertoire varie aussi selon les personnes avec qui je joue. On panache ce qui appartient au répertoire les uns des autres. Et parfois j'adopte certaines pièces qui deviennent aussi des pièces de mon répertoire quand je joue seule

Et bien sûr c'est important de jouer ce qu'on aime, ses coups de coeur, mais là je pense qu'on est tous d'accord, c'est pourquoi je l'ai mis à la fin ! Découvrir un morceau et ne pouvoir attendre le lendemain pour essayer de le jouer, ne pas vouloir que le soir se couche sans l'avoir apprivoisé, y revenir le lendemain et les jours suivants... Brûler de le faire découvrir aux autres...

Voilà finalement mon répertoire est comme ma vie, il est composé de mille moments, mille reflets... et comme dans la vie, parfois je ne choisis pas, parfois je choisis... Mais de toute façon je l'aime par tout ce qui me plait, et, pour ce qui me plait moins, pour ce que ça m'apporte et qui me permet d'aller plus loin.

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